Pour ce cinquième article de ce défi de fin d’année, je t’emmène avec moi à la Cité Radieuse. Nous en avions déjà parlé cet automne dans un Café des voyageurs à l’occasion du passage d’Invader à Marseille. Il avait choisi le toit terrasse de l’Unité d’Habitation de Le Corbusier comme quartier général avant de déployer ses créations partout dans la ville. À cette occasion, j’avais fait découvrir la Cité Radieuse aux schtroumpfs et j’ai dû dire un peu fort que j’aimerais beaucoup, l’espace d’une nuit découvrir l’intérieur d’un appartement car le Père Noël, a été très inspiré et m’a offert une nuit dans l’une des Chambres Musées de l’Hôtel Le Corbusier. Nous avions beaucoup parlé avant les fêtes de zéro déchets et de cadeau d’expérience, voilà donc qui est parfaitement tombé.

Nous en avons donc profité avec WanderlustDad pour nous offrir une escapade marseillaise en amoureux et jouer les touristes dans notre propre ville comme dans le micro voyage #18, une chambre en ville de L’art de voyager sans partir loin, mon super guide dont je te parle souvent. C’est donc en métro et à pieds que nous avons gagné le 280 boulevard Michelet et l’hôtel avec notre petit baluchon sur le dos. Avant de te faire découvrir cet hôtel atypique, je te propose de faire un petit voyage dans le temps, afin de comprendre ce qui fait de La Cité Radieuse un lieu unique en son genre.
Du logement social au Patrimoine mondial de l’Unesco
À la fin de la seconde guerre mondiale, Marseille connait un manque de logement sociaux. En 1946, l’État passe donc commande auprès de Le Corbusier pour construire un immeuble d’habitation. Il pense alors la construction d’un village vertical, sur pilotis, afin de libérer de l’espace au sol. La construction de l’Unité d’Habitation de Marseille, la première en son genre, démarre en 1947 pour se terminer en 1952. Son architecture brutaliste, très moderne pour l’époque ainsi que les couleurs sur la façade lui valent à l’époque le surnom de « Maison du Fada. »
Un petit reportage, signé France Culture, résume en 3 minutes l’histoire de la construction de la Cité Radieuse, son concept ainsi que les vives réactions, celle de Salvador Dalì en tête, qu’elle a suscité à sa construction. On y voit Lilette Ripert, institutrice de l’école, amie de Le Corbusier et occupante de l’appartement 50, dont on reparlera par la suite.
Toutefois, en faisant un tour à l’intérieur, on se rend vite compte qu’elle n’a de « fada » que le nom car tout a été calculé dans le moindre détail pour que le logement, qui est, rappelons-le, à l’époque, un logement social, soit le plus respectueux possible de la nature humaine et que la vie en son sein soit conviviale et sereine, d’où le nom de Cité Radieuse.

C’est donc en s’inspirant du nombre d’or, comme beaucoup d’artistes avant lui, que Le Corbusier crée le Modulor, qui servira de base à toutes les mesures de l’immeuble de la hauteur sous plafond à l’aménagement des plans de travail des cuisines designées par Charlotte Perriand. C’est d’ailleurs ce Modulor qui nous accueille dans le hall de l’immeuble, tout près de l’unique cage d’ascenseur.

La Cité radieuse compte 9 étages, appelées rues, dont un toit terrasse qui offre une vue splendide sur l’ensemble de la Ville. Selon la volonté de l’architecte, on retrouve un hall, qui fait office de place du village, des commerces, un restaurant, un gymnase, une école, une pataugeoire, un hôtel, un cinéma, des bureaux…
Pendant longtemps, les habitants pouvaient passer leur commande auprès de l’épicerie de la troisième rue et se faire livrer directement leurs courses dans les boites prévues à cet effet et située tout près de chaque porte. Aujourd’hui l’épicerie a fermé, la rue commerçante située au troisième héberge la Librairie Imbernon, spécialisée dans les ouvrages d’art et d’architecture, des studios de designers, une créatrice de bijoux et l’hôtel… (Tu vois comme je fais un teasing de dingue ?!? Mais attends un peu je n’en ai pas encore fini avec l’histoire…). Tout au bout du couloir, tu pourras goûter à la vue mer à travers les fenêtres qui logent le jardin d’hiver.
L’unité d’habitation compte 337 appartements de tailles diverses allant des chambres d’amis mutualisées voulues par l’architecte afin que les résidents puissent accueillir leur famille au besoin sans avoir une pièce inoccupée à l’année dans leurs appartement à l’appartement pouvant accueillir 10 personnes. La majorité des appartement est construite en duplex. Un appartement témoin est visitable, hors crise sanitaire, sur réservation auprès de l’office du tourisme avec un conférencier.
En 1954 le logement social devient copropriété. Elle est inscrite une aux monuments historiques du vivant de Le Corbusier, et classée par deux fois, une première en 1986 pour l’extérieur et les parties communes et en 1995 pour l’appartement 50. En 2016, alors que les constructions nouvelles pullulent dans le quartier, menaçant l’intégrité de la vue depuis le toit terrasse, le bâtiment est classé au patrimoine mondial de l’Unesco.
Il existe en plus de la Cité Radieuse marseillaise, 4 autres unités d’habitations signées par le Corbusier :
- La Maison Radieuse de Rézé près de Nantes
- L’Unité d’habitation de Briey en Meurthe et Moselle
- L’Unité d’habitation de Firminy Vert, dans la Loire
- La Corbusierhaus de Berlin

La Cité radieuse de Marseille, tout comme ces petites soeurs ont donc le statut à la fois d’immeubles d’habitations et de monuments historiques. Il conviendra donc, avant de s’y rendre de jeter un petit coup d’oeil à ce guide de visite très bien fait par l’association des habitants. Ce site est une vraie mine d’informations pratiques et historiques sur l’unité d’habitation marseillaise. En cette période de crise sanitaire, l’UH a drastiquement, et on peut le comprendre, réduit les possibilités de visites. Seules, sont accessibles au public les 3ème et 4ème rues. Le toit terrasse et sa vue sur la mer ne sont accessible que sur présentation d’un badge… C’est là que dormir à l’hôtel devient intéressant.
Un hôtel unique en son genre
Minute chauvinisme on
Parce que : « Oui, Môssieur« , il a 5 unités d’habitations Le Corbusier en Europe, mais chez nous, à Marseille, on est les seuls à avoir pensé à y loger un hôtel… Amendonné comme on dit chez nous, (traduire pour toi cher lecteur qui viendrait du grand Nord, « à moment donné »), il faut rendre à Marseille ce qui lui appartient, nous avons le seul hôtel au monde dans un bâtiment Le Corbusier. Donc si tu veux dormir dans une chambre d’hôtel signée par le grand architecte, c’est dans la Cité Phocéenne qu’il faut venir…
Minute chauvisme off
Comme je te le disais plus haut, Le Corbu, (on commence a être intimes alors, on va l’appeler par son petit nom) avait voulu, au troisième étage un lot de 16 chambres d’amis dont les habitants pouvaient réserver lorsqu’ils avaient de la visite. Le système n’ayant jamais vraiment pris car personne ne voulait prendre la responsabilité de s’occuper de cet hôtel miniature, une véritable structure hôtelière a donc été créé.
En 2003, Dominique et Alban Gerardin rachètent l’hôtel. Pendant deux ans, alors catégorisé 2 étoiles. Ils oeuvrent à rénover le restaurant et la réception tout en ayant à coeur de conserver l’esprit design et vintage du lieu jusqu’à obtenir leur troisième étoile. Les 21 chambres que comptent l’hôtel ont chacune une décoration dans l’esprit de cellules telles que les a conçues Le Corbusier, tout en respectant les standards de l’hôtellerie moderne. Tu trouveras le descriptif de chaque type de chambre ainsi que les tarifs sur le site de l’hôtel.
Ce couple de passionnés tient à insuffler au lieu un esprit « d’hôtel d’hôtes ». À notre arrivée, Dominique nous a fait découvrir notre chambre, l’un des deux studios avec vue sur la mer. Elle a pris le temps de nous raconter l’histoire de chaque pièce de mobilier ainsi que l’esprit Mad Men qu’elle a souhaité donner à ce studio. Elle nous a fait une démonstration de la cuisine, telle qu’elle avait été pensée par le tandem Corbu-Perriand pour « libérer la femme des contraintes domestiques ». La cuisine n’est pas opérationnelle, mais elle permet de voir l’esprit et la conception de l’un des studios destinés aux étudiants à l’époque. La vue y est spectaculaire, on arrivait à voir les moutons de la mer déchaînée s’échouant sur le Frioul, les lumières de la grande roue…
Une chambre avec vue sur le parc
Dominique a été intarissable sur l’histoire du lieu, nous a raconté des tas d’anecdotes sur la création de la Cité Radieuse, l’évolution de l’hôtel, le triste incendie qui a ravagé une partie du bâtiment en 2012. Elle nous a même donné l’opportunité de visiter la suite Lilette, reconstitution de la chambre de Lilette Ripert située dans l’appartement 50, dont je te parlais plus haut. On y retrouve des luminaires Le Corbusier ainsi que la cloison tableau noir conçue par Charlotte Perriand. Avec un vrai talent de conteuse, elle nous a raconté, simplement la vie de l’immeuble tel qu’elle le voit évoluer depuis qu’elle y vit. En cette période le bar est fermé mais on sent bien que c’est un point de ralliement aussi pour les habitants qui s’y installent d’ordinaire volontiers pour un café.

Ils accueillent aussi les gourmets dans leur restaurant Le ventre de l’architecte, avec sa carte semi gastronomique sous la houlette du chef Jérôme Caprin et sa vue imprenable sur la mer à travers la loggia. Il compte une note de 4,1 / 5 au guide Michelin. Les menus sont disponibles sur la page, Le ventre de l’architecte du site de l’hôtel. En ces temps de confinement, ils proposent de la vente à emporter pour les repas de fêtes du 31 décembre ainsi qu’un room service pour les clients de l’hôtel. Dans le cadre de ce dernier, nous avons eu l’opportunité de goûter à la cuisine familiale d’Alban et à la mousse au chocolat façon orangette de Dominique, je peux vous assurer qu’il ne nous est rien resté dans l’assiette.
En tant que client de l’hôtel, vous bénéficiez statut de résident de la Cité Radieuse. Vous pouvez donc à ce titre accéder aux infrastructures communes qui ne sont, d’ordinaire, pas ouvertes aux visiteurs.
Préparer ta visite
Je t’ai déjà donné pas mal d’informations. Entre le site de l’hôtel, celui de l’association des habitants La Cité Radieuse et celui de l’Office du tourisme, tu as déjà une bonne base pour découvrir La Cité Radieuse.
N’hésite pas à aller faire un tour sur le site du MaMo, le centre d’art fondé par le designer Ora-ito sur le toit terrasse. Il donne chaque année carte blanche à un artiste pour réaliser une exposition in-situ sur le toit terrasse. Après Invader, Batman, Buren, Varini, la belle saison sera une nouvelle occasion d’accueillir un grand nom de l’art contemporain. Si tu arrives de loin, cela peut-être l’occasion de faire une d’une pierre deux voire trois coups et de profiter de la Cité Radieuse, d’une chouette expo et de la mer.
Si toutefois, tu venais à avoir envie de tout connaître de l’oeuvre du Corbu avant de venir, la librairie Imbernon propose sur son site une sélection très complète de beaux livres sur la Cité Radieuse et les différentes facettes du travail de son architecte, à Marseille mais aussi de façon plus large. La librairie est aussi partenaire d’actions en faveur du jeune public dont j’ai déjà beaucoup parlé sur le blog et dispose d’un fond pour les enfants assez sympa sur l’art, l’architecture et sur l’oeuvre de Le Corbusier. Si des références te plaisent tu peux passer directement commande sur le site. Pas mal, non ? pour continuer à soutenir les libraires indépendants ?
À voir / à faire aux alentours
Si tu as fini d’explorer la Cité Radieuse et que tu veux te lancer à l’assaut du quartier, voici une liste de quelques lieux que tu pourrais avoir envie de découvrir. Ayant été prise de court par ce cadeau fort inspiré, je n’ai pas eu le temps de rechercher quelques trésors cachés du secteur dans Marseille insolite et secrète, je remédierai à cela dès que possible. Toutefois, le quartier du 8ème et du 9ème arrondissement, si tu visites la Cité Phocéenne pour la première fois, t’offrent de belles opportunités de découvertes, sans forcément sortir des sentiers battus. Excentré par rapport au Vieux Port et au quartier du Panier, traditionnellement très fréquenté des touristes, ce secteur est très prisé l’été car assez proche des plages.
Envie de shopping ?
Ça y est la troisième rue n’a plus de secret pour toi et tu as envie de courir les boutiques. Tu peux aller faire un tour

- au Centre Prado Shopping, ouvert tous les jours, il compte 30 boutiques et 4 restaurants
- sur l’avenue du Prado dans sa partie qui va en direction de la place Castellane
- sur la rue Paradis
Passion sport et nature ?

Le quartier est particulièrement bien desservi en terme d’équipements sportifs et parcs. Tu trouveras de nombreuses pistes cyclables et des stations de Vélo partagés assez régulièrement. Le mythique Stade Orange Vélodrome est vraiment tout proche. Il propose, hors période de confinement, l’OM tour Stadium, des visites qui permettent d’accéder au bord de pelouse, aux vestiaires et de découvrir l’envers du décor…
Si le foot ne t’intéresse pas mais que les courses hippiques sont ton dada, l’hippodrome Borély, situé en bordure du parc Borély n’est pas très loin. Avec les beaux jours, de nombreuses courses s’y tiennent et tu peux retrouver le programme sur le site de la société hippique de Marseille.
Les chemins de randonnées à travers les calanques ne sont pas très loin non plus. Tu trouveras au Rond Point du Prado, des bus qui te conduiront soit vers Les Goudes, soit vers Luminy pour découvrir les chemin d’accès au Parc National des Calanques.
N’hésite pas non plus à aller marcher le long de la Corniche Kennedy. Les Marseillais se plaisent à dire que le banc que l’on y trouve est le plus long du monde… Légende ou réalité, je te laisse trancher, mais c’est un peu comme la sardine si tu veux mon avis… Toutefois, certaines portions ont été décorées de mosaïques par des écoles, des structures privées et des centres sociaux et donnent à notre promenade du bord de mer un faux airs de Parque Güell. La vue est spectaculaire sur les îles du Frioul et du château d’if d’un côté, et sur l’Escale Borély et la Pointe Rouge de l’autre.
Côté baignades et nautisme, tu seras aussi servi, les plages de David et de l’Escale Borély sont accessibles avec le bus 19 ou à pieds si tu n’as pas peur de marcher quelques kilomètres.
Envie d’art ?
Côté patrimoine, le quartier est assez bien desservi, on y trouve :
- Le Ballet National de Marseille qui propose des répétitions publiques sur inscription et des visites gérées par l’office du tourisme.
- Le Chateau Borély qui accueille le musée des arts décoratifs, de la faïence et de la mode
- Le MAC, Musée d’art contemporain, situé dans le quartier de Bonneveine, il a dans ses collections des oeuvres de Klein, Basquiat ou encore Buren.
- Non loin de là, tu pourras admirer le célèbre pouce de César.
- En longeant l’avenue du Prado pour aller en direction du Parc Borély, et le long de la Corniche, il te suffira de lever les yeux pour trouver des hôtels particuliers.
En famille
Si tu as choisi de venir avec les enfants, comme tu as pu le voir le quartier est plutôt animé et sympathique. Les plus petits seront contents de
- Gambader dans les allées du parc Borély : c’est l’un des parcs les plus prisés des Marseillais. Si les conditions sanitaires le permettent, tu pourras y louer des vélos à 4 places, faire de la barque sur le lac, observer les canards et les ragondins, flâner dans la roseraie, faire du manège, visiter le jardin botanique… (On me dit dans l’oreillette, que c’est aussi très romantique, même sans les enfants…)
- Faire un tour sur la grande roue de l’Escale Borély
- Aller à la recherche des traces d’Invader et améliorer ton score sur l’application Flash Invader
- Tu peux aussi te faire un cinéma du côté du Chambord si tu préfères les petites salles ou du cinéma le Prado, situé près de la place Castellane si tu es plutôt dernières sorties
Je tiens à spécifier avant de terminer que cet article n’entre pas dans le cadre d’un partenariat avec l’hôtel. Il s’agit de notre retour d’expérience en tant que visiteurs. Je prends le parti sur le blog de ne parler que des expériences que j’aime et que j’ai envie de recommander. J’assume pleinement le fait de soutenir, dans la mesure de mon possible et de la ligne éditoriale du blog, les acteurs impactés par la crise Covid qu’ils soient libraires, hôteliers, restaurateurs, acteurs de la culture… Écrire ce mini guide alors que la plupart des lieux que j’aime dans ce quartier sont actuellement fermés n’est pas évident. J’espère pouvoir très vite l’éditer à la faveur d’un retour à la vie normale.
Il me tenait à coeur depuis longtemps de te faire découvrir la Cité Radieuse de façon plus approfondie, et la découverte de l’Hôtel Le Corbusier m’a permis du même coup de te proposer un nouveau Mini Guide sur Marseille avec une thématique plus maritime.
Si tu nous suis depuis quelques temps déjà, tu sais à quel point les rencontres sont importantes pour nous en voyage. J’estime que voyager, c’est s’ouvrir sur le monde et que ce dernier commence dès que tu as passé la porte de chez toi. J’ai visité de nombreuses fois la Cité Radieuse, en tant qu’étudiante, en avec mes classes, en visiteur libre avec les enfants. Et bien cette fois-ci, j’ai encore découvert des choses et nous avons fait une vraie belle rencontre. L’après-midi de notre arrivée est passée en un clin d’oeil, sans que l’on s’en rende compte à visiter l’immeuble, comme des résidents. J’ai eu l’impression l’impression curieuse d’être à la fois vraiment en voyage dans ma propre ville et de redécouvrir un monument que je pensais bien connaître et en même temps, de me sentir comme à la maison. Nous avons adoré cette parenthèse architecturale. On valide donc à 100 % le concept du micro voyage #18 de L’art de voyager sans partir loin dont je parlais en introduction et ainsi que celui du micro voyage #8 , un jeu d’enfant dans les allées du Parc Borély.
Et toi ? As-tu déjà testé les hôtels de ta ville ? As-tu déjà vécu l’expérience staycation, où tu joues les touristes à la maison ? Qu’en as-tu pensé ?
À bientôt 😉