Luna de Serena Giuliano

Après avoir dévoré cet été, Ciao Bella et Mamma Maria, les deux premiers romans de Serena Giuliano, j’attendais avec impatience la sortie de son prochain bébé le 18 mars prochain. L’attente a toutefois été écourtée. Grâce à une opération exceptionnelle de Masse critique sur Babelio, j’ai eu le privilège de découvrir en avant première Luna. Pour cela, je tiens à remercier chaleureusement Babelio, les éditions Robert Laffont, ainsi que l’autrice, qui a eu la gentillesse de dédicacer les épreuves du roman. Prêts à embarquer pour Naples ?

Résumé

« Parfois, on pense trouver le soleil en août, mais c’est la lune qu’on trouve en mars. »

Luna arrive à Naples contre son gré : son père est gravement malade. Rien, ici, ne lui a manqué. Ses repères, ses amies, son amour sont désormais à Milan. Alors pourquoi revenir ? Pourquoi être au chevet de son papà, au passé trouble, et avec lequel elle a coupé les ponts ?

Mais Napoli est là, sous ses yeux : ses ruelles animées et sales, ses habitants souriants et intrusifs, sa pizza fritta, délicieuse et tellement grasse, son Vésuve, beau et menaçant…

Est-il seulement possible de trouver la paix dans une ville si contrastée ? Et si ce retour aux sources sonnait finalement l’heure de l’apaisement ?

Mon avis

Retrouver un roman de Serena Giuliano c’est un peu comme prendre un café avec une copine avec laquelle nous échangerions nos souvenirs de vacances dans le Sud de l’Italie. Dès les premières pages de Luna le ton est donné. Bienvenue à Naples, Napoli la bruyante, la désordonnée, celle qui dès votre arrivée tient à ce que vous n’ayez pas froid aux pieds, ni le nez qui coule en vous vendant à la sauvette des chaussettes et des mouchoirs en papier même par quarante degrés à l’ombre. Celle qui avec toute son exubérance vous accueille à bras ouverts tout en vous bombardant de questions plus vite qu’un tir de mitraillette. Après la côte Amalfitaine, c’est la capitale de la Campanie qui est mise à l’honneur dans ce nouveau roman.

Luna est avant tout un odi et amo, une plongée dans les sentiments contradictoires qui lient le personnage principal à la ville qui l’a vue naître et dans laquelle elle a grandi, mais aussi à son père. Un père qui a dû faire des choix douloureux pour faire face à la pauvreté et à la précarité qui touche massivement la ville. Malgré ses merveilles et les ressources dont elle dispose, malgré les années qui passent Naples reste la même, rongée par la corruption, la mafia et les petits trafics. Si la question méridionale était au coeur de Ciao Bella et l’immigration était le thème central de Mamma Maria. C’est la Camorra et le système de santé qui sont cette fois-ci en toile de fond.

La visite des amies de Luna venues de Milan pour un week-end est le prétexte à une découverte des merveilles de la ville qu’elles soient culturelles, naturelles ou gastronomique. En effet, dans les pas de Luna, on visite cloîtres, églises et autres galeries qui font la renommée de la ville pour les touristes. On se balade aussi sur la côte Amalfitaine. On admire sous toutes les coutures le Vésuve qui trône en majesté sur la baie de Naples et qui malgré sa beauté, représente une véritable menace pour la ville dont témoignent Pompéi et Hercolanum. Côté gastronomie, clairement, si tu es actuellement au régime, ce livre risque de mettre à rude épreuve ta volonté. Parmiggiana, babbà, sfogliatelle, pasta alle vongole, Serena Giuliano met un point d’honneur à rendre hommage à la cuisine traditionnelle napolitaine. La cuisine familiale faite avec amour pour les gens qu’on aime. Je crois qu’en lisant le bouquin, j’ai dû prendre à peu près cinq kilos…

Luna est un personnage drôle, dans l’humour et la répartie qu’elle peut avoir dans les conversations sur What’s app qu’elle a avec ses copines milanaises. Elle est aussi touchante dans sa façon de se replonger dans ses souvenirs. Retrouver sa chambre de petite fille, ses journaux intimes, sa cousine qu’elle a longtemps considéré comme une soeur ou une meilleure amie lui rappellent que tout dans cette ville et dans sa vie d’avant n’est pas à jeter aux orties.

Dans la galerie des personnages que nous propose l’autrice, j’ai aussi beaucoup aimé la sagesse de Filomena, l’humaine (parce qu’il y a aussi Filomena le chat, qui nous offre de grands moment de rire). J’ai beaucoup ri avec les prises de becs de Pasquale, le voisin de chambre du père de Luna, et sa femme la signora Anna. Cette dernière est aussi agaçante de principe qu’elle est adorable de dévotion envers les gens qui l’entourent. Face à l’adversité, elle trouve refuge dans la prière, dans les proverbes, dont elle abreuve Luna à chacune de ses visites et dans la nourriture, qu’elle essaie à tout prix de faire avaler à son mari pour qu’il reprenne des forces. Et puis il y a Gina, la cousine de Luna, qui a partagé ses joies et ses peines pendant toute son enfance et le début de son adolescence. Si elle n’a pas eu une vie facile, elle montre une belle force de résilience. Elle a perdu sa mère jeune, n’a pas fait d’études, elle enchaîne plusieurs boulots pour subvenir aux besoins de sa famille. Elle cache son manque d’estime d’elle-même derrière un look coloré, voyant et excessif loin de l’image que l’on se fait de l’élégance à l’italienne et derrière un dévouement à toute épreuve à la famiglia. Et puis soyez attentifs, si vous avez lu les précédents romans de l’autrice, peut-être retrouverez vous quelques clins d’oeil glissés çà et là.

Comme dans les précédents romans, la musique est omniprésente. Le nom de la protagoniste est un clin d’oeil à une chanson des années 80. Pino Daniele et Gigi d’Alessio, les grands noms de la chanson napolitaine ne sont jamais loin. Mais la plus jolie des musiques qui apparait au fil des pages est sûrement celle du dialecte napolitain. Par des proverbes, des expressions populaires, il ponctue délicieusement le récit pour lui donner une touche d’expressivité et d’authenticité supplémentaire. Naples sans son dialecte ne serait pas vraiment Naples, n’en déplaise aux gens du Nord de la péninsule.

Voilà un roman qui se déguste de la même façon qu’une pizza fritta, rapidement et avec gourmandise… J’ai beaucoup aimé cette lecture qui m’a replongée dans des souvenirs de vacances. Les traits de caractères des personnages m’ont rappelé des rencontres que j’ai pu faire au cours de mes voyages dans le Sud de l’Italie. D’aucuns pourront croire qu’elle force gentiment le trait, mais si vous connaissez la région et ses habitants, vous retrouverez sûrement dans les anecdotes qui jalonnent ces pages un peu de votre vécu Je n’ai maintenant plus qu’une envie, que la situation sanitaire s’adoucisse et qu’il soit de nouveau possible de prendre la tangente pour retourner me perdre dans les ruelles de Spaccanapoli et déguster de la street food et des pâtisseries pleines de crème…

J’espère vous avoir donné envie de le lire, si c’est le cas, rendez-vous en librairie le 18 mars.

À bientôt 😉

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Ciao Bella de Serena Giuliano

Ciao Bella

Il était une rencontre

Voilà, j’ai encore cédé à un coup d’un soir ! En ce moment, les livres se succèdent au rythme de un par jour. Mais là, waouh, c’était puissant ! J’avais croisé plusieurs fois le livre sur les réseaux sociaux, j’avais lu des avis mitigés, j’ai résisté en le voyant dans la sélection de l’été chez Cultura puis je me suis finalement laissée tenter en le trouvant sur les rayons de la bibliothèque. On s’est rencontrés vers 22h00 et on s’est quittés vers 2h30 du matin. Entre temps, des rires, de l’émotion, un échange de souvenirs communs. Lorsque j’ai fermé la dernière page, j’ai eu l’impression de quitter une vieille connaissance que je n’avais pas vue depuis longtemps. J’étais tellement bouleversée que j’en ai eu du mal à m’endormir malgré l’heure tardive.

Le résumé

Voilà l’histoire :

Anna a peur – de la foule, du bruit, de rouler sur l’autoroute, ou encore des pommes de terre qui ont germé… Et elle est enceinte de son deuxième enfant. Pour affronter cette nouvelle grossesse, elle décide d’aller voir une psy.

Au fil des séances, Anna livre avec beaucoup d’humour des morceaux de sa vie. L’occasion aussi, pour elle, de se replonger dans le pays de son enfance, l’Italie, auquel elle a été arrachée petite ainsi qu’à sa nonna chérie. C’est toute l’histoire familiale qui se réécrit alors sous nos yeux.

À quel point l’enfance détermine-t-elle une vie d’adulte ? Peut-on pardonner l’impardonnable ? Comment dépasser ses peurs pour avancer vers un avenir meilleur ?

Mon avis

Par où commencer ? Des sensations sûrement, une série de curieuses coïncidences. Une histoire qui commence le jour de la naissance de ma Bisnonna à moi, ma Mémé, comme le dit Anna. L’histoire d’un personnage qui me rappelle à de nombreux égards la mienne. Mes vacances d’adolescente dans le Sud de l’Italie. La rencontre d’un amoureux étranger, un 13 aussi (mais pas un vendredi), la cohabitation de deux cultures. Cette volonté de trouver une exutoire dans l’écriture d’un blog avec le passage à la trentaine…

Ce matin, j’ai comme une méchante gueule de bois littéraire après cette nuit à rire et à pleurer. Parce que clairement, je ne m’étais pas pris une claque émotionnelle pareille en lisant un livre depuis Il est grand temps de rallumer les étoiles de Virginie Grimaldi. J’ai appris en lisant le bouquin et les remerciements qu’elles sont bien copines toutes les deux. Je les soupçonne d’organiser des réunions Tupperware secrètes où elles s’échangent des secrets pour transformer de jeunes mères de familles respectables en pandas dégoulinants et reniflants jouant de la trompette avec leurs kleenex de la façon la plus stonnata qu’il soit (désolée pour l’italianisme mais c’est le seul mot français qui me vienne, dysharmonieuse, ferait trop pompeux…).

Bref voilà, j’ai encore perdu toute dignité en lisant un livre… Dieu merci ! WanderlustDad dormait déjà à l’heure à laquelle le drame est arrivé. Sinon, il se serait encore allègrement moqué de ma faculté à m’identifier tellement aux personnages que j’ai l’impression qu’ils font partie de ma famille ou qu’ils représentent une partie de moi. Il adore ça, traquer la première larme et éclater de rire en me traitant de ciotaredda, (comment le traduire celui-ci ? nounouille peut-être ?)

Ce matin, Georgette, la macchinetta (ça fait pas un peu titre de livre de la série pour enfants Les drôles de petites bêtes ?), ma cafetière italienne est mon amie… Et oui, certains trouvent raffiné de boire un café avec George, ses capsules qui coûtent un bras, et son What Else so sexy… Moi je préfère le boire avec Georgette, ses rondeurs, son petit bruit inimitable. Malgré son grand âge, rien ne pourrait remplacer l’odeur de son ristretto qui emplit la maison. Je repense avec nostalgie à ses vacances en Italie qui rythme mes étés depuis 25 ans maintenant, à ma belle-mère qui trouve toujours ses petits fils sciupati trop maigres à son goût, au caffè con la schiuma de Zia M., à Nonna A., son chignon et son sacré caractère, à Nonna M. qui nous délectait des histoires de sa jeunesse depuis sa chaise en plastique et parlait un dialecte tellement ancien que la comprendre était un défi digne des jeux olympiques lancé à mon italien scolaire, aux vecchiette d’Orsomarso, notre village d’adoption en Calabre, qui malgré le fait que j’y revienne tous les étés depuis une dizaine d’années, finissent toujours par céder à la curiosité, après m’avoir longuement observer et me demandent quand elles me croisent dans les ruelles du village « A cu’ si figghia ? » (De qui est tu la fille ?) ou « A cui appartenese ? » (À quelle famille tu appartiens ?) m’obligeant à remonter à la troisième génération de l’arbre généalogique de mon mari pour leur permettre de me raccrocher à une branche. À B. la voisine de ma belle-mère qui a développé des techniques de renseignements dignes de la Madame Raspail du sketch de Patrick Bosso et à tant d’autres.

En écrivant ses lignes, l’odeur de la pasta al forno du dimanche qui emplie les vanedde, les ruelles si serrées du village que seuls les humains et les ânes y passent, et les images des processions de la Santa Anna, patronne du village me revienne en mémoire. Anna, comme l’héroïne du livre… À Giulia, la soeur de l’héroïne qui porte le nom que j’aurais aimé donner à ma fille si j’en avais eu une… Hasards ou coïncidences, avec Ciao Bella, nous étions fait pour nous rencontrer.

Je vais m’arrêter là parce que je pourrais continuer à en parler encore des heures et je finirai par te spoiler le bouquin. Comme tu le sais peut-être, pour des raisons liées à notre envie de devenir minimalistes j’achète peu de livres pour moi, et j’en garde encore moins. Je pense cependant que Ciao Bella, fera partie des bouquins que j’offrirai avec plaisir et des rares livres que je finirai par acheter, mais pas tout de suite…

Lire ce livre en français, a été comme une délicieuse madeleine de Proust, mais il m’a manqué, la musique, la langue de Dante et la sonorité si particulière du dialecte napolitain, qui ponctue nos étés depuis 25 ans. Alors je l’achèterai, pour le relire, et perdre une nouvelle fois ma dignité, (tu me diras, on est plus à ça près…) le jour où une maison d’édition italienne offrira à Serena Giuliano le plaisir de déclarer son amour à sa Campanie natale dans la langue de ses origines. Affaire à suivre !!!

Serena, Grazie di cuore per questo bellissimo viaggio !

J’espère t’avoir donné envie de découvrir cette petite pépite. Et si tu l’as lu, n’hésite pas à laisser un commentaire pour me dire ce que tu en as pensé ?

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À bientôt 😉