Grandir un peu de Julien Rampin

Grandir un peu, Julien Rampin

Il était une rencontre

Il y a quelques semaines, je m’inscrivais sans trop y croire pour le Prix des lecteurs U après avoir réservé le cadeau de Noël des Schtroumpfs…

Il y a deux semaines, comme un cadeau de Noël avant l’heure, je recevais un paquet avec deux livres à l’intérieur. Sous le regard scrutateur de WanderlustDad qui connaît la hauteur de ma pile à lire et fait preuve d’une sainte patience lorsque je rentre d’une virée livresque avec des livres sous le bras et le regard du chat de Shrek, j’ouvre le petit carton et découvre la bonne nouvelle. Je fais partie du jury pour le Prix des lecteurs U et vais avoir la chance de découvrir 6 romans cet hiver. Comme disait notre cher Forest Gump, « la vie c’est comme une boite de chocolat, on ne sais jamais sur quoi on va tomber ». Le premier envoi contient Grandir un peu de Julien Rampin et Mémoire de soie d’Adrien Borne, deux romans de jeunes auteurs dont je n’avais pas encore entendu parler.

C’est Grandir un peu qui retient mon attention le premier avec sa couverture qui fleure bon la douceur et la régression avec ses volets bleus et ses branches de mimosa. Le résumé a achevé de me convaincre : une jeune femme en quête d’identité, une mamie rock’n roll et son petit-fils que la vie n’a pas épargné. Voilà une fine équipe qui me promettait de passer un agréable moment en sa compagnie. C’est donc avec plaisir que j’ai glissé ce petit bonbon dans mon sac à dos pour m’accompagner au cours de mon voyage vers l’Italie.

L’histoire

« Une vieille bâtisse en pierre aux volets bleus, perchée sur une colline, loin de tout. C’est là que Jeanne trouve refuge quand elle décide, sur un coup de tête, de partir avec sa collection de vinyles sous le bras pour fuir un mari indifférent et une existence qui ne lui ressemble pas. Cette maison est le royaume de Raymonde, une grand-mère fantasque et rebelle à la recherche d’une dame de compagnie, et de Lucas, son petit-fils. Tandis que les chaudes journées d’été défilent, tous trois s’apprivoisent et vivent une parenthèse enchantée hors du temps. Hélas, le temps, lui, ne s’arrête jamais vraiment et la vie va bientôt les rattraper pour les obliger à grandir un peu. « 

Quatrième de couverture

Mon avis

Voilà une jolie rencontre fortuite, de celles qui vous font passer un moment dans une bulle de douceur, d’amour et d’amitié. J’ai beaucoup aimé la galerie de personnages qui font la force de ce premier roman de Julien Rampin. Tous cabossés par la vie et ses aléas et qui un peu comme des poussins dans le nid, se réunissent pour se tenir chaud.

Il y a d’abord Jeanne, la trentaine passée, mariée à son amour de jeunesse Cet archétype de la gentille fille décide un beau matin d’arrêter de se complaire dans un mariage dans lequel elle n’est pas heureuse et se sent invisible. Avec tout son courage, elle décide de quitter son foyer et son homme et part avec ce qui constitue la chose la plus précieuse à ses yeux, sa collection de vinyles de variété française. Parce qu’elle est comme ça Jeanne, délicieusement vintage et surannée. (Et je ne dis pas cela parce qu’à l’heure de Deezer et Spotify, j’adore aussi le craquement du saphir sur le disque et l’acoustique si particulière du vinyle…). Par le plus grand des hasards, elle découvre une annonce qui la conduit tout droit à la ferme de Raymonde dans la campagne lauragaise.

Comme je te le disais en intro, Raymonde est une mamie rock’n roll qui n’a pas sa langue dans sa poche. Excentrique et loufoque, il y aurait de quoi écrire une saga sur sa vie tant elle a été trépidante mais, comme tous les personnages de cette histoire, Raymonde a aussi ses fêlures, ses blessures et ses secrets. Si elle a appris au fil des ans à vivre avec, ils n’en sont pas moins douloureux. Elle n’a d’yeux que pour son Lulu.

Lucas est le petit-fils de Raymonde. Malgré sa petite trentaine il a connu de nombreuses tempêtes et abandons. Il voit en sa grand-mère, sa ferme, les personnages de ses romans favoris et sa collection de boules à neige un havre de paix où se reposer après toutes ses mésaventures.

Autour du joyeux trio, gravitent aussi d’autres personnages tout aussi attachants. Ginette est la meilleure amie de Raymonde. Et en matière de BFF (best friend forever), on peut dire que ces dernières font fort. Depuis plus de soixante ans, ces deux femmes que tout opposent partagent joies et galères. Il y a aussi Samir, le gentil caissier du supermarché que Raymonde adore chahuter…

Entre virées hebdomadaires au supermarché, séance de bronzette sous le soleil brûlant de l’été, road trips improvisés et feux d’artifice du 14 juillet, on découvre des morceaux d’histoire de nos protagonistes. Les aller-retour entre passé et présents sont nombreux et les souvenirs de Jeanne, Lucas et Samir remontent à la surface au fil des pages et des révélations de Raymonde. La métaphore du puzzle est filée tout au long du roman, et l’on découvre par petit bout, les morceaux de l’histoire de Raymonde qui viennent combler les trous de celle de Lucas grâce à l’aide toujours bienveillante de Jeanne. Tous ensemble, ces grands enfants vont grandir, un peu…

J’aime beaucoup les histoires dans lesquelles la musique est présente. Ici je n’ai pas été déçue, la playlist du roman apporte une touche de pep’s supplémentaire à l’histoire.

Voilà donc un feel good book comme on les aime, un vrai petit ourson à la guimauve pour reprendre l’image de la boite de chocolats que j’utilisais en intro… C’est avec grande joie que j’ai retrouvé la région toulousaine que j’aime tant et (re)parcouru avec nos personnages, les routes que nous avions traversées lors de notre trip à pieds sur les bords du Canal du Midi. Bref, à quelques jours de Noël si tu es à la recherche d’une petite idée cadeau à glisser sous le sapin pour un(e) ami(e) fan de ce genre d’histoires, tu peux y aller les yeux fermés.

Et toi ? Tu l’as lu ? Il t’a plu ?

À bientôt 😉

Publicité

Dérive des âmes et des continents – Shubhangi Swarup

Après ma première chronique sur NetGalley, j’ai eu le grand plaisir que les éditions Métailié me fassent confiance pour chroniquer ce livre qui m’a tout de suite attirée avec sa couverture toute en douceur et en poésie.

Il était une rencontre

Dans la sélection de mes livres sur NetGalley, j’essaie toujours de suivre la ligne de notre blog et de solliciter les éditeurs autour de romans qui abordent la question du voyage ou du dépaysement. Après la couverture, le résumé de ce roman pour le moins atypique a fini de me convaincre.

L’histoire

Difficile de résumer ce roman qui m’a complètement transportée, je te laisse donc avec sa quatrième de couverture :

Magistral premier roman indien où le paysage, la terre, la mer, les montagnes et les personnages principaux (deux jeunes mariés, un yéti mélancolique, un géologue, une tortue…) semblent inventer un genre en soi : la fiction de la nature.

Un roman tellurique, où les histoires semblent surgir organiquement le long d’une ligne de faille qui fait trembler la terre et tout ce qu’elle contient de l’océan Indien à l’Himalaya. Peut-être le premier roman où la nature s’exprime directement.

Deux jeunes mariés s’installent dans une ancienne demeure coloniale, sur les îles Andaman, et tentent de s’apprivoiser. Ils savent qu’ils se sont déjà aimés dans d’autres vies. Girija Prasad est un scientifique fasciné par les volcans lilliputiens et les phénomènes naturels de l’archipel. Chanda Devi est un peu sorcière ; elle sait amadouer les éléphants en colère, prévoir les tremblements de terre et parler aux fantômes qui peuplent les îles (soldats japonais, lord anglais, mangeurs d’escargots, une chèvre bêlante).

Plusieurs personnages plus loin (un jeune révolutionnaire, un trafiquant désabusé, un yéti mélancolique, une tortue, une strip-teaseuse…), on retrouve leur descendant le long de la ligne de faille sismique : un géologue chargé de s’assurer que le prochain sommet himalayen, prévu pour être plus haut que l’Everest, surgira bien dans le cadre des frontières de l’Inde, pour encourager le tourisme.

Premier roman au souffle incroyable, Dérive des âmes et des continents surprend par sa puissance narrative, à la hauteur des tsunamis qu’il contient.

Mon avis

Quand j’ai choisi ce livre, j’étais loin de m’imaginer être à ce point transportée. Je lis rarement de littérature asiatique et je pense après cette expérience que c’est une chose à laquelle je vais essayer de remédier rapidement.

Dérive des âmes et des continents est un livre qui, comme un tsunami, vous attrape et vous transporte vers de lointaines contrées des îles d’Andaman, à la Birmanie, en passant par le Népal et les contreforts de l’Himalaya. Il nous propose un voyage dans le temps, et dans l’histoire géologique mais aussi contemporaine de cette région du monde. Entre conflits mondiaux, guerres d’indépendance, installation des dictatures, les destins d’inconnus se lient et se délient, représentant un fil rouge entre les différentes parties du roman.

Le style de Shubhangi Swarup est lyrique et empreint de poésie et on retrouve bien à travers sa façon de décrire le monde, les philosophies indiennes, selon lesquelles, en chaque être vivant se cache une âme. La galerie de portraits qu’elle nous propose est particulièrement attachante.

D’un scientifique obnubilé par les îles et la techtonique des plaques à un autre chargé d’observer le désert de glace de glace de l’Himalaya que plusieurs générations séparent, on se plait à se perdre en forêt avec une femme qui comprend les plantes, entend les fantômes de l’île et à des intuitions sur le futur, à espérer avec une mère la libération de son fils, à écouter les récits des marchands et contrebandiers qui voyagent de la Birmanie au Pakistan, à écouter les histoires de déesses fleuves et de créatures fantastiques racontées par des anciens. On tremble aussi parfois, face à la cruauté de l’homme…

J’ai beaucoup aimé ce livre car sous son attrait poétique et onirique, qui ravira les amateurs de belles plumes, il est aussi très documenté scientifiquement sur les questions géologiques. J’ai été un peu en retard sur la publication de cette chronique car je me suis laissée déborder par la rentrée au boulot mais il fait partie des livres que je recommanderais volontiers. En effet, à chaque fois que j’ai allumé mon ordinateur pour retrouver cette lecture, je n’avais qu’une envie, terminer la partie pour savoir quel serait le personnage qui nous emmènerait visiter la prochaine curiosité géologique, quel pan de l’histoire nous allions recomposer avant de boucler la boucle.

Et vous ? Vous l’avez lu ? Il vous tente ?

À bientôt 😉